En effet, sous la pression de la finance internationale, les industriels ont opté plusieurs décennies durant pour des délocalisations massives. Ce faisant, le Covid-19 a mis en évidence notre incapacité. Aussi, les morts du Coronavirus sont-ils les victimes de cette guerre industrielle : les respirateurs, les masques, les gants, les kits de test, les médicaments, … tout ce qui nous manque à ce jour, ce sont des produits de l’industrie.
Tandis que la globalisation de l’économie a conduit à une standardisation contrainte toujours plus intense des rapports commerciaux sous toutes ses formes (financiers, bancaires, fiscaux, juridiques, etc.), avec un discours affiché d’autorégulation par l’économie (renvoyant au dogme d’Adam Smith et de la main invisible), les états reviennent à la manœuvre et prennent davantage la conduite des affaires. Les grandes nations sont dirigées par des hommes d’autorité. La politique impose à nouveau sa primauté sur les affaires économiques.
Ainsi, Donald Trump tente-t-il de dompter les GAFAM – avec le chantage au démantèlement – pour mieux les assouvir et les mettre en ordre de marche dans la compétition numérique engagée contre la Chine. De la même manière, il tente d’écarter Huawei et ZTE des marchés publics de la 5G, les stigmatisant en les accusant de développer des technologies permettant de pratiquer l’espionnage digital (les fameuses back doors). Il favorise ainsi l’industrie nationale au détriment d’entreprises étrangères.
Nous nous éloignons donc davantage des guerres commerciales ancestrales (encore que la guerre de l’Opium ne soit pas loin d’un certain point de vue) – guidées par les seules considérations douanières et tarifaires – pour entrer dans le champ de la guerre intégrale, où tous les leviers sont utilisés pour renforcer les positions économiques des états et de leurs fleurons industriels et commerciaux. Cela dans un souci de cohésion nationale, dont le concept a longtemps été écarté au bénéfice du seul profit financier, immédiat.
Dans ce contexte, mettre fin à plusieurs décennies de dépendance industrielle ne se résout pas par une volte-face brutale ; cela doit s’ébranler dans le cadre d’une doctrine stratégique mûrement réfléchie.